Dessin de Chappatte, Suisse
L’éditorialiste du principal quotidien de l’île résume le sentiment général. Réaction à chaud
Depuis [quelques jours], je sens une énorme colère monter en moi. Ce n’est pas seulement à cause de la taxe sur les comptes en banque (je n’ai pas d’argent à perdre). C’est surtout parce que j’ai l’impression encore une fois d’avoir été pris pour un imbécile. Je suis, comme n’importe quel citoyen de ce pays, victime d’une arnaque. D’un côté je dois payer les pots cassés des dirigeants chypriotes, et de l’autre je dois subir le “jeu politique” de nos partenaires européens. Mais, comme le disait le poète Eschyle, “il n’est pas plus terrible que la colère d’un peuple qui grogne”. Sauf que dans notre cas le peuple a dépassé le stade de la grogne. Même la patience du peuple le plus bienveillant a ses limites. Et, quand on les dépasse, la colère déborde et peut tout balayer sur son passage.

Dans ce cas précis, c’est ce qui va se passer. Tous ensemble, en tant que peuple ayant une dignité et une conscience, nous devons sortir dans la rue et dire avec toute la force de notre âme que nous ne sommes pas des idiots. Nous devons crier de toutes nos forces : “Ça suffit !”

Sur le fond, il n’y a pas besoin d’avoir un master en économie pour comprendre les conséquences. La grande majorité des gens sont touchés personnellement. De la mamie qui a réussi tant bien que mal à économiser 5 000 ou 10 000 euros jusqu’au salarié qui mettait de côté chaque mois un peu d’argent pour que son enfant fasse des études plus tard.

Pour celui qui a des millions en banque, le problème est que, comme il en a “beaucoup”, on va lui en prélever un peu. Nous savons très bien ce que cela signifie. Les grands épargnants vont mettre leur argent ailleurs, au grand dam de l’économie locale. Ce qui ne manquera pas de se traduire par de nouveaux licenciements, des faillites de PME… On connaît la suite. Mais ce qui ressort de cette affaire est la faillite de la confiance du peuple envers l’Europe. Ce n’est pas de cette Europe que nous rêvions, ce n’est pas cette Europe que nous voulons. Car dans notre Europe ce genre de comportement n’aurait pas de place.