Commémoration de la fin de l’esclavage
La Réunion, une île arc-en ciel?
Louée pour son métissage, l’île de la Réunion fait figure d’exemple d’une société qui a su intégré des composantes de population aussi diverses que ses vagues de peuplement. Si l’île n’est pas touchée par le « racisme ordinaire » dénoncé depuis quelques semaines en métropole, de nombreuses expressions créoles pointent les différents groupes ethniques et des slogans anti « Komor » ou « zoreil » ne sont pas rares. Si l’on gratte un peu, le mythe s’effondre? Alors que le 10 mai 2011 marque les célébrations de la journée de l’abolition de l’esclavage et l’avènement de l’égalité, Imaz Press fait le point sur les relations entres les différentes composantes de la population réunionnaise .
Une journaliste de TF1 porte plainte à Paris contre un CRS qui s’est étonné qu’une personne noire puisse être embauché par la chaîne, les thèses du Front National qui gagnent du terrain… Le racisme latent est dénoncé depuis plusieurs années en métropole mais atteint des sommets avec l’affaire de racisme supposé au sein de la fédération française de football début mai 2011.

Alors que le 10 mai commémore la fin de l’esclavage et incite à lutter contre l’oubli de ce pan de l’histoire, la promotion de l’égalité et la lutte contre la discrimination doit encore faire son chemin. Ainsi, une telle affaire est-elle possible dans l’île? « Ca ne viendrait à l’idée de personne ici », estime Jacques Pénitot, secrétaire de la ligue des droits de l’homme à la Réunion, à propos des quotas présumés pratiqués à la fédération française de football. « Le mélange des communautés est plus important ici qu’ailleurs. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas, parfois, de repli sur son groupe ethno-culturel », indique-t-il.

Malgré tout, la ligue des droits de l’homme de la Réunion entreprend des actions sur le sujet dans les écoles et auprès des jeunes qui effectuent leur service civique. « Le racisme est une construction idéologique. C’est une fabrication d’opinion. Les enfants ne connaissent que leurs copains, quelle que soit leur apparence », poursuit-il. D’où la nécessité de prévenir : « on n’est pas à l’abri de tensions ».

Notamment en période de crise économique qui a toujours favorisé le repli. « En France, on a l’habitude de se retrouver dans des situations anti-étrangers mais qui ne se caractérisent pas forcément par du racisme », indique Erick Murin, du Cran Réunion (Conseil représentatif des associations noires).

Selon lui, à la Réunion « nous avons appris à vivre entre nous et à nous partager une terre que tout le monde convoite ». Même si quelques actes de racisme rappellent parfois que tout n’est pas si simple. Il cite les insultes dont a été victime il y a quelques jours Cyrille Hamilcaro, l’ex maire de Saint-Louis.

Mais d’autres faits peuvent être mentionnées. En aout 2010, un enseignant avait été révoqué de l’éducation nationale après avoir infligé des insultes racistes une jeune femme alors qu’il était en état d’ébriété sur la voie publique. La députée maire de Saint-Paul, Huguette Bello, a déposé plainte après la distribution de tracts racistes dans les boites aux lettres de la ville durant la campagne des cantonales de 2011.

Des cas isolés? « Il n’y a pas vraiment de problème de racisme à la Réunion », poursuit Erick Murin. En revanche, « les kaf (réunionnais d’origine africaine – ndlr) portent toujours de poids de l’histoire. Le kaf a appris à vivre dans la discrimination », indique-t-il. D’après lui, les cas de discrimination ne sont pas plus nombreux ces dernières années, en revanche, ceux qui en sont victimes sont de moins en moins enclins à se laisser faire.

« Des chiffres montrent que la discrimination est une réalité à la Réunion », indique Didier Lefevre, représentant régional du défenseur des droits, anciennement appelé Halde (haute autorité pour le lutte contre les discriminations). Depuis son installation à la Réunion en 2006, le service a reçu 800 plaintes, dont 450 pour la seule année 2010. 60% d’entre elles concernent des réclamations invoquant le critère de l’origine. « Qu’il y ait de plus en plus de saisines ne signifie pas qu’il y a plus de discriminations mais simplement que les gens sont plus informés sur leurs droits », poursuit Didier Lefevre.

Récemment, l’institution a obtenu réparation auprès du Crous pour un étudiant mahorais auquel l’attribution d’une bourse avait été partiellement refusée. Il a touché 6 200 euros d’indemnisation, à hauteur du préjudice subit. « Les réclamations concernant la communauté mahoraise sont de plus en plus fréquentes », indique encore Didier Lefevre en invitant les gens qui se sentent victimes d’une discrimination à ne pas hésiter à saisir le service.

Mais que dire des expressions créoles pointant les différents groupes ethniques qui peuvent heurter certaines sensibilités? Si un « mon kaf », « ma kafrine » et autres « mounoir » ont une connotation affectueuse, qu’en est-il des « Lo kaf lé kouyon », « Kaf la taye », « Malbar vantar, vilin, volèr… », « Zarab lé volèr », « Komor i sen mové », « Malgashe i aim fé lo sor, ou « Zorey lé makot »… Sans parler des « zoreil déor » ou « komor déor » qui défigurent certains murs.

« La Réunion ne peut pas être l’île parfaite, l’île arc en ciel que l’on décrit. Nous avons aussi nos problèmes », indique pour sa part Erick Murin. En apparence moins importants qu’en métropole mais bien présents.

En attendant la ferme pédagogique
Qui veut un tigre ?
Fermé au public depuis 2006, le zoo du Chaudron à Saint-Denis doit être transformé en une ferme pédagogique qui pourrait ouvrir en fin d’année prochaine. Depuis 2009, les animaux ont petit à petit quitté le site. Restent quelques émeus, des wallabys et surtout, Django, un tigre de 28 ans trop vieux pour attirer les foules.
Django est toujours là, calme sous son arbre, les rayures vives. Mais Django est vieux. A 28 ans, personne ne veut de lui…. Pourtant, ce tigre du Bengale, une espèce protégée, né à la Réunion de parents mauriciens est un peu la mascotte du zoo du Chaudron fermé en 2006. Depuis, des animaux sont partis, mais d’autres, comme les émeus, des serpents et des wallabys attendent toujours de trouver preneur.